La mission du BoekenOverleg:

Un secteur du livre économiquement sain

L'impact du coronavirus sur notre secteur du livre est double. D'une part, les Belges, disposant soudainement de montagnes de temps libre, ont lu davantage et beaucoup ont redécouvert leur amour de la littérature. D'autre part, les ventes dans les librairies physiques se sont arrêtées pendant le premier confinement et les consommateurs ont été poussés à acheter des livres en ligne. Après le premier confinement, cependant, les consommateurs ont eu du mal à retrouver le chemin des librairies physiques. Literatuur Vlaanderen, en tant que secrétaire du BoekenOverleg, se fait la figure de proue et le fervent défenseur des librairies locales et physiques. "En ligne, c'est bien, mais acheter local c'est mieux", peut-on lire.

Qui est Paul Hermans? Et qu'est-ce que Literatuur Vlaanderen?
Depuis janvier 2020, Paul Hermans est le directeur de Literatuur Vlaanderen, une organisation qui soutient le secteur littéraire en Flandre en accordant des subventions aux auteurs, traducteurs, éditeurs et organisateurs. En outre, Literatuur Vlaanderen joue un rôle important en réunissant les différents acteurs du secteur du livre pour œuvrer à un paysage littéraire riche et diversifié avec une offre de livres large et inclusive. Par exemple, Literatuur Vlaanderen est le secrétaire du BoekenOverleg, un organe consultatif qui promeut les intérêts communs du secteur du livre et de la littérature tout en respectant la diversité et l'autonomie de tous les acteurs représentés au sein du BoekenOverleg. Le BoekenOverleg est l'interlocuteur politique pour les questions relatives aux livres et à la littérature. Ainsi, au cours de l'été 2020, le BoekenOverleg a formulé un plan de redressement avec un certain nombre de propositions aux gouvernements flamand et fédéral afin d'apporter une réponse aux besoins financiers à court terme du secteur du livre et de donner l'espoir d'un secteur du livre sain et dynamique.

Le plan de relance

Depuis quand notre secteur du livre n'est-il plus sain?

Paul Hermans, directeur de Literatuur Vlaanderen: "Avant la pandémie, le vaste secteur culturel - y compris les arts - était qualifié de secteur économique sain dans une étude de Graydon. Lorsque le premier confinement a été mis en œuvre en mars 2020, nous avons très vite remarqué que son effet sur les ventes de livres était énorme. Les librairies ont été contraintes de fermer, si bien qu'à part les kiosques à journaux, qui proposent une gamme très limitée de littérature, aucun livre n'est vendu dans les magasins physiques. Les ventes de livres ont chuté et se sont déplacées vers le canal numérique. Mais l'effet de la crise Covid a dépassé les ventes de livres. Les effets ont été ressentis immédiatement par les éditeurs, les auteurs, les organisations littéraires, les organisations de promotion de la lecture, etc. Les manifestations dans les espaces physiques étaient soudainement impossibles. De nombreux auteurs ont vu leurs lectures ou leurs travaux d'écriture (pour le théâtre, entre autres) annulés ou reportés en masse, les laissant sans revenu. Partant de ce constat, un fonds d'urgence pour les auteurs et un plan de redressement pour un secteur du livre économiquement sain s'imposaient.

Nous voulons faire prendre conscience au consommateur de la valeur d'un riche paysage du livre en Flandre

En quoi consiste exactement un tel plan de reprise?

Hermans: "Il faut savoir que ce plan de relance n'est pas une première réalisation. Depuis plus de dix ans, le BoekenOverleg a réussi à aborder de manière structurée tous les thèmes importants du domaine du livre et de la littérature dans le cadre d'une large consultation sectorielle. Au cours de la dernière décennie, cela s'est traduit par un mémorandum détaillé à chaque élection, qui a également été présenté aux politiciens et aux chefs de parti en personne. Nous avons déjà obtenu des résultats positifs grâce à elle, tels que le prix réglementé du livre, un plan d'action inter-politique pour la promotion de la lecture (aujourd'hui cristallisé dans l'offensive pour la lecture) et une campagne générique pour le livre. C'est dans cette tradition que nous avons proposé ce plan de reconstitution".

Quelles étaient ces propositions?

Hermans: "Il s'agit tout d'abord d'encourager les consommateurs à acheter des livres par le biais d'une vaste campagne de lecture. Entre-temps, le ministre de la culture Jan Jambon a décidé d'aller dans ce sens. En 2022, en fait dès maintenant, cette campagne du livre générique sera également lancée avec des actions à différents moments de l'année. Avec cela, nous nous concentrons également sur le #buylocal. Les géants internationaux de l'internet s'approprient une grande partie des dépenses et du chiffre d'affaires flamands. Nous voulons donc faire prendre conscience aux consommateurs de l'utilité d'un riche paysage du livre en Flandre. Dans le plan de relance, nous avons également plaidé pour la réalisation du plan d'action pour la promotion de la lecture et du plan pluriannuel de Literature Flanders dans lequel des fonds supplémentaires (22% sur une base annuelle) ont été demandés pour la période 2021-2025. Les deux points d'action ont entre-temps été réalisés par le gouvernement flamand. Le plaidoyer pour un nouveau prix littéraire général n'est pas non plus tombé dans l'oreille d'un sourd. Nous pouvons affirmer que le gouvernement flamand et le ministre de la culture en particulier ont fortement soutenu le BoekenOverleg".

"Nous assistons à une accélération du transfert de parts de marché des librairies physiques vers l'internet"

"La lecture est un besoin fondamental"

Le secteur du livre était-il déjà en déclin avant la crise Covid?

Hermans: "Je ne dirais pas que notre secteur du livre est en déclin, mais lorsque nous parlons des ventes de livres, je dois reconnaître qu'on enregistre une légère baisse depuis plusieurs années. Au fil de la période Covid, on constate une accélération significative, mais pas de la baisse, car en 2021, les ventes ont en fait augmenté. Ce que nous constatons, c'est une accélération du transfert de parts de marché des librairies physiques vers l'Internet. Nous constatons une augmentation des ventes dans les librairies depuis qu'elles ont été autorisées à rouvrir après le premier confinement, mais il reste encore du travail à faire pour que les consommateurs flamands comprennent l'importance d'investir dans l'économie locale. Nous espérons y parvenir avec la campagne de lecture susmentionnée et le plan de promotion de la lecture."

Quel a été l'impact de la crise Covid sur le marché du livre?
En 2020, le site Boek.be, aujourd'hui en faillite, a interrogé les éditeurs et libraires flamands sur l'impact de la crise Covid dans le secteur du livre:
- 40% des répondants ont fait état d'une baisse des ventes de plus de 51%. La raison principale est que 70% des personnes interrogées indiquent que les ventes sont au point mort ou ont complètement cessé.
- 20% des personnes interrogées indiquent qu'il existe un risque réel que leur entreprise fasse faillite.
- De janvier à avril, le chiffre d'affaires de l'ensemble du marché flamand du livre a diminué de 4,5%.
- Les canaux de vente au détail physiques enregistrent une baisse de 30% de leur chiffre d'affaires en glissement annuel.

Il n'y a pas que les ventes de livres qui ont souffert du virus, j'imagine que de nombreux auteurs ont également ressenti l'impact?

Hermans: "Absolument, et ce jusqu'à aujourd'hui. Jusqu'au début de cette année, des lectures d'auteurs étaient encore annulées en raison des mesures en vigueur. Les conférences constituent une importante source de revenus pour de nombreux auteurs. En 2020, un fonds d'urgence de 1,3 million d'euros a été mis en place pour les auteurs, les illustrateurs et les traducteurs. Ce fonds était triple. Il s'agissait de compenser la perte de lectures, la perte de droits d'auteur et la perte de publicité, car si vous publiiez un nouveau livre en tant qu'auteur, vous n'aviez pratiquement aucune possibilité d'attirer l'attention sur lui. Une demande justifiée a pu être soumise à l'été 2020, ce qui a conduit à une compensation limitée (en moyenne 1.500 euros) pour 439 auteurs. Le montant restant de ce fonds d'urgence est revenu au budget flamand et a été utilisé en 2021 pour une aide à l'innovation à laquelle les créateurs littéraires et les auteurs pouvaient également participer."

"La lecture est un besoin fondamental et notre gouvernement l'a également compris"

Les contacts avec les autorités flamandes et fédérales sont-ils harmonieux? Veulent-ils travailler sur un secteur du livre économiquement sain?

Hermans: "Cela se passe bien. L'importance de la littérature est largement reconnue. Prenez par exemple la campagne de préparation du gouvernement flamand. Chacun sait que de bonnes compétences linguistiques et de lecture augmentent les chances de participer pleinement à notre société. La lecture n'est pas seulement une affaire de belles histoires, mais aussi de connaissances de base qui aident le lecteur à développer une vision du monde. Elle offre un miroir de nous-mêmes, une fenêtre sur le monde: elle contribue à la connaissance de soi et nous rend plus tolérants. En bref, l'alphabétisation offre des opportunités. N'oublions pas que plus de 10% de la population flamande est encore faiblement alphabétisée, que de nombreux écoliers ont des difficultés à 'lire de manière exhaustive' et vous comprendrez que nos gouvernements, également dans le domaine de la politique d'alphabétisation, feraient bien d'intensifier leurs efforts."

"Notre travail n'est jamais terminé"

Comment nous situons-nous par rapport aux pays voisins? La situation actuelle y est-elle comparable?

Hermans: "Nous n'avons pas une image claire de cela. Les mesures sont souvent différentes, mais aussi les cadres dans lesquels le travail est effectué. Toutefois, en raison de la pandémie survenue au cours des deux dernières années, les gens se sont beaucoup regardés - qui fait quoi, et qu'est-ce qui fonctionne bien? Cela a conduit à un certain partage des connaissances. Au Canada, par exemple, des travaux ont été menés sur la compétitivité des librairies locales par rapport aux géants de l'Internet grâce à la réduction des frais d'expédition pour les librairies et les éditeurs canadiens - une mesure utile que nous étudions en vue d'une éventuelle mise en œuvre ici aussi. L'Europe a également mis l'accent sur les livres et la littérature et sur l'importance des traductions. Une question très utile, car les connaissances en matière de traduction des petites langues sont soumises à une pression croissante, ce qui entraîne un appauvrissement."

Que faudrait-il mettre en place pour que notre secteur du livre retrouve son équilibre? Sommes-nous sur la bonne voie?

Hermans: "Je n'irais pas jusqu'à dire que notre secteur se porte mal à l'heure actuelle, mais nous pourrions mieux faire. En ce moment, beaucoup de choses se passent qui doivent encore avoir un impact, comme la campagne de lecture. Je me réjouis donc de l'avenir et d'un secteur du livre plus florissant. Mais on n'en a jamais fini; il y aura toujours de nouveaux défis et de nouvelles questions. Il est donc essentiel de prendre le temps de se poser et de profiter d'un bon livre. Sinon, tout se précipite. Ce n'est pas le but."